Non, les Martiniquais ne sont pas…

3 octobre 2014

Non, les Martiniquais ne sont pas…

Il y en a marre. Trop, c’est trop !
Marre d’entendre que les Martiniquais sont ceci, que les Antillais sont cela…
Le pire, c’est que nous sommes nous mêmes nos propres Inquisiteurs, à nous offrir sans séance tenante, aux flammes du bûcher.

Alors non, une fois pour toutes, ou du moins jusqu’à la prochaine, les Martiniquais ne sont pas :

Racistes.
Nous serions racistes, avec nos propres congénères ? Il y aurait donc une ascension salvatrice de la peau. Une « mûlatresse » serait mieux qu’une « chabine » [1], elle même à son tour mieux qu’une « coolie », la dernière strate étant réservée aux « négresses ».
Quoi?! Des salariés noirs n’accepteraient pas un chef, un manageur, un encadrant noir! Ils n’accepteraient que les blancs?
Qu’ouïs-je d’autre? Que des couples « dominos » (noir-blanc) subiraient des « remarques » désobligeantes, voire des insultes!
Sottises! Balivernes!

Oui cela a existé. Ne le nions pas. Oui cela continue d’exister. Ne l’ignorons pas.
Mais qu’en est-il de tous ceux qui vivent avec l’autre? L’autre dans sa différence. L’autre dont on ne se rend même pas compte qu’il est différent. L’autre qui fait partie du décor. L’autre que l’on a envie de recevoir. L’autre au bèlè, en athlétisme, au basket, l’autre au travail. L’autre, camarade, ami, compagnon, mari, père.  L’autre dans la tolérance.

Fainéants.
Sans blague. Nous rechignerions à la tâche ? Pire dans la fonction publique ?! Certains cultiveraient l’art de ne rien faire à l’excès. D’autres s’appliqueraient à refuser toute tâche, toute proposition, toute action nouvelle ou innovante, ou même évidente mais pas formalisée, par principe. Pour le plaisir de ne rien faire. Ou pour le plaisir de dire non.
D’autres encore se spécialiseraient dans la complaisance du chômage, dans l’expertise de l’évitement d’entretiens-miracle (entendez Pôle-Emploi) conduisant aux promesses de l’activité. C’est bien entendu qu’il y a du travail ! Visiblement les usines manquent de coupeurs de cannes, les structures d’agent d’entretien, et les entreprises du BTP de manœuvres…
Et puis il y aurait ceux qui auraient choisi de travailler au développement du pays : de maternités en maternités, s’égraineraient les revenus de la CAF.
Sornettes!

Oui cela a existé. Ne le nions pas. Oui cela continue d’exister. Ne l’ignorons pas.
Cependant, je serais tentée de croire que s’il y en a qui ne font rien, il y en a qui font deux fois plus, le travail n’étant pas volatil.
Je me plais à croire, que mes compatriotes au chômage, recherchent des emplois dans les domaines d’activités qui les intéressent, ou plutôt dans les domaines d’activités pour lesquels ils ont été formés, aux niveaux auxquels ils ont été formés.
Et je pense à toutes ces mères, seules ou accompagnées, qui finissent tard, trop tard, pour profiter de leurs enfants, justement parce qu’elles ont trop d’activités (notamment professionnelles).
Je pense aussi à ceux qui travaillent tous les jours de la semaine (et même le soir), pour faire fructifier leurs entreprises, et dont les bénéfices ne seraient leurs, qu’à partir du vendredi, l’Etat se taillant la part du lion.

Incompétents.
C’est une plaisanterie. Lors d’appels de la mairie de votre ville, vous seriez orientés vers des services qui ne sont pas désignés pour la résolution de votre problème?
Il arriverait même, que très souvent vous ayez l’impression d’informer les professionnels des évolutions légales de leurs cœurs de métier.
Ou encore, vous auriez l’impression de faire le travail de votre collègue ou de votre supérieur hiérarchique, à sa place (en plus de votre plan de charge évidemment) parce que vous ne l’en sentez pas capable.
Ridicule. Abject.

Oui cela a existé. Ne le nions pas. Oui cela continue d’exister. Ne l’ignorons pas.
Mais, je préfère voir la richesse incommensurable de ce pays, à la matière grise épatante, florissant de personnalités, d’actions, de projets originaux, à la pointe de la technologie, répondant aux problématiques environnementales, de santé, de management, etc.. et j’en passe.
Je focalise mon attention sur ceux qui dans l’ombre, choisissent de s’acquitter du travail de leurs pairs pour l’assurance que le travail soit fait, et bien fait.

Désagréables.
Pas possible! Dans un magasin de prêt-à-porter on vous ferait sentir que l’on ne souhaite pas s’occuper de vous?
A la caisse on ne répondrait pas à votre salut, à votre sourire ?
A la poste, on vous signifierait que vous interrompez une conversation, oui même s’il s’agit d’une conversation sur la tenue de « manzel » [2] ou sur le « ich kon’  » [3] de untel ?!
Mais n’importe quoi! C’est impensable.

Oui cela a existé. Ne le nions pas. Oui cela continue d’exister. Ne l’ignorons pas.
Mais si on ne répond pas aux saluts et aux sourires, ne serait-ce pas parce que d’aucuns saluent et sourient? Et parmi ces « d’aucuns » il n’y aurait donc aucun Martiniquais ?! Et si nous, sommes si nombreux à nous offusquer de ces travers, n’est-ce pas parce que nous ne nous inscrivons pas dans ces schémas? Dans ces attitudes?

Une fois pour toutes, et j’espère qu’il n’y en ait pas de prochaine, tordons le cou à nos clichés. Ces arbres qui cachent les forêts. Ceux-là qui nous empêchent d’évoluer, de nous grandir. Ceux-là qui nous enferment dans la fatalité du « c’est-perdu-d’avance » du « i-bon-konsa » [4]. Soyons ouverts d’esprit et avançons.

Non les Martiniquais ne le sont pas.

 

 


[1] personne claire de peau ayant les cheveux crépus et blonds.
[2] créole, littéralement « mademoiselle »
[3] créole, familier « bâtard »
[4] créole, littéralement « c’est bon comme cela »

 

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Commentaires

RitaFlower
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Je suis Martiniquaise à moitié.Satisfaite d'avoir enfin une digne Representante de la Martinique
sur Mondoblog pour la Saison 4.Hormis les clichés et les idées reçues sur les Martiniquais que j'entends aussi defois du coté de la Métropole par les Antillais eux-memes.Moi,je n'ai jamais compris cette classification des individus de la peau la plus claire à la plus foncée.Au nom de quoi,peut-on juger une personne à la couleur de son épiderme...bref.C'est juste mon avis.

Maudou
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Bien sur qu'on ne peut juger les personnes sur leurs couleurs de peau.
Le texte ici a pour but de lutter contre les clichés sur les martiniquais. Il existe des racistes partout, c'est déplorable, mais pas qu'en Martinique.
Merci encore de l'accueil.